Des étudiants délaissés par leur établissement scolaire

Depuis le premier confinement, de nombreux étudiants subissent le revers de la crise sanitaire. Cours à distance, sentiment d’abandon ou encore annulation de leurs échanges universitaire, cette population est l’une des plus impacté par le covid 19.

Victoria Simoës Massoni, 22 ans, danseuse semi-professionnelle s’est retrouvée du jour au lendemain dans le flou le plus total. Complètement abandonnée par son école, Victoria s’est sentie délaissée, seule face à elle même durant cette crise sanitaire.

« Tout a commencé en mars 2020, lorsque j’étais à New-York et que l’épidémie du Covid 19 à démarré. J’ai dû immédiatement quitter le territoire américain, abandonnant mes cours de danse à la « Joffrey Ballet School. J’ai également laissé tomber mes études en Art à l’université du New Jersey», témoigne la danseuse de ballet. De retour en France, l’étudiante continu, malgré le décalage horaire, sa formation de danse et ses cours en visioconférence« Ce n’était vraiment pas facile, j’étais très déboussolée physiquement et mentalement », explique-t-elle « Il m’arrivait de terminer un cours ou un entraînement de danse à trois heures du matin ».  

Ne pouvant pas reprendre ses études aux Etats-Unis, en septembre 2020 elle intègre l’académie internationale de danse de Leila Da Rocha et Patrick Dupont, la White Eagle Dance Academy, à Bordeaux. « C’est une école professionnelle et réputée en France, où je me suis très rapidement sentie bien », assure la ballerine.
Un accompagnement sportif et scolaire très sérieux dans cette école qui correspond aux attentes de Victoria.
« En quelques semaines j’ai progressé et j’ai repris du plaisir à danser sur le plancher d’une salle de danse », reconnaît Victoria.
Elle ajoute que « c’était un soulagement pour moi après ces six mois enfermés chez moi dans un 40m2, où il était difficile de m’entraîner ».

Cours de ballet à la Joffrey Ballet School à New-York, Novembre 2019. © Sacha Dourian

« La formation s’est arrêtée du jour au lendemain »

« Le cauchemar a recommencé un mois après ma rentrée ». En octobre un cluster est détecté à l’internat où beaucoup de danseurs ont été contaminés. Suite à cela, l’école a été contrainte de fermer ses portes pour deux semaines minimum.
« ça a commencé par un isolement de 14 jours, comme les mesures sanitaires le stipulaient», explique la jeune femme.
« Après ça, le gouvernement ordonne la fermeture de toutes les salles de sport et studios de danse pour une durée indéterminée.
Et là tout s’est effondré dans ma tête ». Une restriction sanitaire qui a directement pénalisé les sportifs de haut niveau. Même avec cette étiquette là, aucun cours ne pouvait être envisagé en présentiel.

« Depuis ce jour ma formation s’est arrêtée et l’école a définitivement fermé définitivement  ses portes ». Abandonnée sans aucune explication autre que celle de la crise sanitaire, l’étudiante s’est retrouvée seule face à elle-même. « Aucune mesure n’a été mise en place par l’académie afin d’entretenir mon corps et mon esprit », rapporte Victoria. « C’est -à -dire que l’on a complètement été délaissé », ajoute-t-elle frustrée. Aucun cours de danse en vidéo conférence a été donné, « la formation s’est arrêtée du jour au lendemain sans explication ». 

« J’étais mal, très mal, les trois mois qui ont suivi étaient un calvaire »

Victoria Massoni

Un report de l’année scolaire ne correspondait pas aux attentes de l’étudiante et sportive professionnelle. Tout de même envisagé pour assurer ses études, postule dans de nouvelles écoles. Malheureusement cela n’a pu aboutir, étant donné que la pandémie était toujours présente en janvier 2021. Une nouvelle fois délaissées par son école, elle est rentrée chez elle.
« Je me suis donc retrouvée, comme en mars 2020, toute seule dans mon salon à danser. ll ne fallait que je perde mon niveau et ma forme physique », témoigne-t-elle. « Je travaillais des pas et des sauts. Une chaise me servait d’appui pour faire les exercices de barre et un lino posé au sol pour éviter les blessures. », détaille la jeune femme de 22 ans. 

Entraînement à l’école de danse à Aix en Provence. © Marie Lozzi

Maintenir sa forme physique et mentale malgré tout

Pour conserver son niveau de danse, Victoria s’inscrit aux cours en visioconférence que propose d’autres écoles de danse. Des entraînements indispensables pour la jeune danseuse ballerine.  « J’ai besoin à ce moment-là qu’un professeur me vienne en aide et corrige mes erreurs ». Pour elle, il n’était pas possible de continuer toute seule.
De plus, grâce aux nouvelles mesures établies par le gouvernement, la jeune danseuse a pu, faisant malgré tout partie d’une formation professionnelle, participer à des stages de danse. « Pendant un mois j’ai intégré la Karl Paquette danseur étoile à l’Opéra de Paris », explique l’artiste. Pour progresser davantage, elle loue également un studio de danse à Aix-en-Provence. Où elle prépare et d’enregistre ses vidéos d’auditions dans de bonnes conditions. 

Malgré des baisses de moral et l’envie de tout abandonner, je n’ai pas baissé les bras, j’ai continué de travailler d’arrache-pied sans ne jamais rien lâcher et cela a payé.

Victoria S.M

Lors de cette période compliquée, la jeune femme a su compter sur le soutien de sa famille et ses amis. Grâce à sa détermination et  la présence de son entourage, la danseuse a su remonter la pente. Après plusieurs auditions passées au cours du mois d’avril, elle décroche enfin une place dans une école internationale de danse. « Je suis très heureuse d’intégrer dès le 1er septembre 2021 le Junior Ballet de la compagnie Etoile Ballet Théâtre de Piacenza, en Italie », annonce-t-elle en ajoutant avec beaucoup d’émotion : « C’est un nouveau départ et j’en suis très fière ».

En ce qui concerne son ex école de danse, la formation White Eagle Dance Academy, la famille de Victoria a lancé une procédure judiciaire.  Afin d’obtenir un remboursement de la totalité des cours payés d’avance et non effectués.
« La procédure s’annonce très longue, heureusement que j’ai la chance d’avoir des parents qui me soutiennent et m’aident financièrement pour envisager mon avenir sous de meilleurs auspices », conclue Victoria Simoës Massoni.

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Comme Victoria, de nombreux étudiants ont connu ce sentiment d’abandon par leurs Instituts. Dans les écoles de commerce, beaucoup d’étudiants ont eux subit la situation par l’annulation de leurs échanges à l’étranger

Les étudiants en école de commerce frappé de plein fouet par le covid

En école de commerce de nombreux étudiants peuvent aller étudier à l’étranger comme il était prévu dans leur cursus scolaire. Beaucoup d’entre eux ont vu leurs échanges à l’étranger être annulés. C’est le cas des élèves de 2ème, 3ème et 4ème année en IBBA à Kedge Business School Marseille. 

« J’ai terminé 10 sur 350 élèves, j’ai réellement bossé pour ces échanges et pour pouvoir choisir sereinement le meilleur endroit. »

Quentin Petit Dit Dariel

Quentin Petit Dit Dariel, étudiant en deuxième année IBBA (International Bachelor of Business Administration), à Kedge. Ce cursus compte 4 ans d’étude avec minimum un an et demi d’échange à l’étranger. Malheureusement, comme beaucoup de ses camarade le jeune homme a vu son avenir professionnel prendre du retard. 
En novembre dernier, les élèves ont dû choisir leur voeux en fonction de leur positionnement au ranking. « Mieux tu es référencé, mieux tu pourras choisir là où tu souhaites partir. », explique l’étudiant en marketing. A savoir que , plus le score est élevé, plus le choix sont denses parmi les écoles proposées. « En revanche, ceux qui sont en bas de la liste, prennent les lieux qui restent». 

Faisant partie des dix meilleurs élèves de première et seconde années, , en octobre dernier, il fait le choix de partir à Singapour. L’une des écoles de Kedge la mieux classée dans le monde.
« J’ai senti le problème arriver, alors j’ai décidé de prendre un peu les devants en demandant à Kedge des garanties », confie Quentin. Après plusieurs échanges avec la direction, Quentin n’a pas eu de réelles réponses à ses questions. 
L’étudiant assure que « l’école n’avait rien prévu, ils restaient positifs pour les échanges prévus en septembre 2021 », avant d’ajouter : « J’ai eu la directrice des programmes, la directrice des échanges ainsi que le directeur de Kedge, leur seule réponse était : “Nous on ne peut pas prévoir”.

ötudiants en école de commerce - covid19 - échanges annulés
Près de 300 étudiants ne sont pas partis étudier à l’étranger cette année. © Kedge Business School

3 solutions proposées

Après l’annulation de leurs échanges, les étudiants en troisième année, on reçu trois solutions de la part de l’école. Premièrement, une année sabbatique en reportant les frais de scolarité à l’année d’après. Deuxièmement, faire des cours à Kedge ou à distance. Et enfin, le choix de la réaffectation dans une autre université.

« Je regrette d’avoir choisi l
‘option « cours », c’était une perte de temps  ». Elisa Gauthier, en 3ème année IBBA est finalement déçue de cette “solution” proposée par son établissement. Pour elle, « cela ne correspond pas à nos études, c’est mettre des cours pour combler le vide et nous faire croire qu’on ne paye pas l’école pour rien », poursuit l’étudiante. 

Pas de réaffectation pour les 2ème années


Contrairement aux étudiants des années supérieures, les 2ème année n’ont pas eu la possibilité d’être ré-affectés. Les seules alternatives proposées par l’établissement sont pour eux : l’année sabbatique ou l’option des cours à Kedge.
A la suite de cela, Quentin est totalement abasourdit :« moi on me dit quelques mois avant que l’école va tout faire pour que cela se passe bien, je tombe sur le cul »,

 « Ils n’ont jamais préparé de plan B à part nous proposer des cours inutiles et une année sabbatique »

Quentin, étudiant en 2ème année IBBA à Kedge Business School Marseille

Quelques mois au paravant, Quentin Dit Dariel dresse de son côté un plan d’alternatives possibles au cas où la situation n’évolue pas. « Le directeur et la directrice des échanges sont littéralement passés à côté », avoue frustré l’étudiant en commerce. Même si l’établissement scolaire de Quentin n’y est pour rien à l’annulation des échanges. Néanmoins, l’étudiant reste déçu du système d’enseignement et de l’organisation de l’établissement. On paye ces écoles une fortune, pour au final finir avec l’équivalent d’un bachelor, c’est décevant », conclut Quentin.

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