Fin de l’année pour les étudiants : un épuisement général teinté d’espoir

La vaccination s’accélère et que les lieux de rencontres rouvrent enfin, mais les étudiants sortent profondément marqués de cette année difficile. Entre cours compliqués, précarité et isolement : le bilan s’annonce lourd.

La plupart des universitaires ont presque fini leur année. Les partiels sont passés, et ses résultats ainsi que ceux de certains concours se font attendre. Pour beaucoup d’étudiants c’est un soulagement, mais aussi un ensemble de questions pour l’année prochaine, et d’espoirs. “Pour l’année prochaine, j’espère surtout être en présentiel”, explique Margaux Willemetz, étudiante en psychologie. “Même si maintenant j’ai fini mon année, il y a une forte impression d’être descolarisée”, ajoute la jeune femme. Selon un sondage de l’Institut Français d’Opinion Public (IFOP), 60% des étudiants interrogés craignent l’impact de l’enseignement à distance. Cela concerne leur santé mentale et leur efficacité à apprendre.

Des troubles physiques tels des maux de tête ou de dos surviennent à force de passer la journée devant un écran. En revanche, cela ne permet pas de dépenser le corps. Seul l’esprit est fatigué, ce qui perturbe le sommeil, et entraîne des difficultés à suivre les cours le lendemain. Ce cercle vicieux s’ajoute aux difficultés du contexte à la maison.

Capture d’écran des résultats du sondage sur la pédagogie pour les étudiants (OVE)

Selon un sondage réalisé par l’Observatoire National de la vie étudiante (OVE), seule la moitié des sondés (58%) disposent d’un espace calme et isolé pour travailler, et 63% d’une bonne connexion Internet. En revanche, selon Laurine Delamarre, étudiante en droit, la difficulté dépend essentiellement du cadre pédagogique. “La pression ne retombe pas”, s’exprime-t-elle. “Je pense vraiment que la crise donne un peu trop de confiance aux professeurs parce qu’ils sont derrière leur écran. C’est bête à dire, mais c’est vraiment comparable aux réseaux sociaux”, conclut tristement la jeune femme.

Une raison supplémentaire pour elle de redouter le déroulement des cours l’année prochaine. “Surtout qu’on ne connaît pas l’équipe pédagogique à l’avance. J’appréhende beaucoup, j’ai clairement peur que ça se passe comme cette année”, ajoute t-elle en précisant que le semestre 2 était le plus compliqué à gérer. D’ailleurs, cette angoisse remonte déjà au début de la crise sanitaire. Même si elle était plus simple à maîtriser grâce à l’idée que la situation sanitaire ne durerait pas aussi longtemps. “Au final, ce qui a le plus de conséquences sur ma santé c’est l’université. Entre l’absence d’impératifs créé par le distanciel et les profs qui nous mettent des bâtons dans les roues, c’est vraiment compliqué”. Un frein à l’assiduité en cours qui semble partagé.

Selon un sondage L’Etudiant/BVA/Orange réalisé en février dernier sur des étudiants, 74% d’entre eux ressentent une forte perte de motivation, et 71% le sentiment de décrochage scolaire. Le soutien entre étudiants semble primordial car, sur ce point, il existe peu de choses mises en place. “Il n’y a pas vraiment d’association (du moins pas que je sache). On a beau se soutenir entre étudiants, ça ne suffit pas à compenser la pression mise par les profs.”, s’exprime Laurine Delamarre. Un sentiment de trop plein partagé par Margaux Willemetz. “Désormais je me sens bien mais ce n’est pas dit, tout retournement de situation peut me mettre au fond du trou.”  Ces conséquences morales ne sont d’ailleurs pas seulement liées aux cours à la maison.

Précarité financière, le fléau des étudiants en 2021

Les crises comme celles que nous vivons actuellement impactent toujours les plus précaires, dont font partie beaucoup d’étudiants. C’est le cas de Margaux Willemetz. “Je suis impactée financièrement car les petits jobs les plus accessibles sont dans la restauration”, affirme la jeune femme. Les boulots étudiants ainsi disparus, il est compliqué de tenir jusqu’à la fin du mois, rien que pour s’alimenter. Thomas, vice-président de l’UNEF en charge de la solidarité durant cette année jusqu’au mois dernier, l’a remarqué. Responsable de l’organisation de la distribution, des partenariats et de l’administratif pour les dons et la banque alimentaire, le jeune homme dresse un constat alarmant.

Les étudiants sont plus tristes que d’habitude,  ils doivent assumer de vraies galères (d’appartement, d’argent, de cours, de bourses…). On sent que ce n’est pas du tout pareil qu’avant”

Selon lui, c’est l’élargissement de cette précarité qui est le plus alarmant. “Ce qui m’a peut-être le plus frappé, c’est des étudiants bénéficiaires qui avant n’auraient jamais eu besoin de distributions de colis ou de repas chauds et qui, par la conjoncture, en ont réellement besoin.”. Selon le sondage de l’OVE, 55% des sondés ont eu des difficultés financières pendant les confinements à effectuer leurs achats alimentaires, et plus d’un tiers d’entre eux (38%) à payer leur loyer. 

Si beaucoup d’entre eux étaient déjà précaires avant la crise sanitaire, certains l’ont subie de plein fouet : un quart a perdu ou modifié son activité rémunérée. Dans ce cas précis, les étudiants se sont tournés vers les structures compétentes dans la recherche de solutions. Thomas précise “Je trouve qu’Aix-Marseille Université (AMU) a plutôt bien géré et était à l’écoute autant que possible des difficultés des étudiants. Ils ont tenté de proposer des solutions avec le Crous, les enseignants et tout le personnel d’AMU.”

Ces aides sont en effet indispensables afin de permettre à ces jeunes de s’en sortir. Avec la réouverture des terrasses et bientôt celle de l’intérieur des restaurants, les extras pourraient être plus accessibles cet été. Cela permet aux étudiants de pouvoir être rémunérés, et pourquoi pas mettre de côté. Cela s’est vu à plusieurs reprises sur les réseaux sociaux : le fait de pouvoir payer son année pour la rentrée 2021 est parfois un casse tête à cause de la crise.

La solitude, raison principale de la chute du moral

Les cours en visioconférence ne permettent pas d'être aussi à l'aise qu'en présentiel.
Les cours en visioconférence ne permettent pas d’être aussi à l’aise qu’en présentiel. (Crédit@pexels)

L’isolement social est un facteur important dans la vie d’un étudiant. Voir ses amis, sa famille, sortir dans des lieux culturels et festifs sont des activités essentielles pour le développement sain d’un jeune adulte. Des conséquences qu’a remarquées Thomas lorsqu’il était au contact des étudiants en difficulté. “J’ai senti beaucoup de stress et des incertitudes qui ont alimenté ce stress, peu d’activités proposées globalement pour des étudiants qui restaient enfermés chez eux la plupart du temps”, précise le jeune homme. A noter que si certains le sont chez leurs parents, beaucoup sont aussi dans des résidences universitaires ou dans des studios assez petits.

C’est pour cette raison que l’association Student Massilia organise des apéros ou peuvent enfin se retrouver les plus isolés. Jeunes travailleurs, étudiants et chômeurs récemment installés sur Marseille s’y rendent afin de faire des rencontres. Camille, trésorière de l’association et également étudiante, témoigne du soulagement général. “Il y avait une ambiance très conviviale. Les personnes venues étaient contentes de pouvoir enfin rencontrer du monde, ce qui était difficile pendant un certain temps à cause du covid-19”. Un plaisir selon elle d’assister à cela. “Connaître de nouvelles de personnes et d’en faire rencontrer à d’autres, et puis voir le plaisir que cela donne à ceux qui sont restés isolés se ressent”. Un désir de contact humain que confirme Margaux, interviewée quelques jours avant la réouverture des terrasses.

C’est dur mentalement car je ne vois quasiment personne, ce qui renforce la solitude.  Il n’y a plus de distractions, de loisirs comme les bars, cinéma… Heureusement que cela va rouvrir”. 

Margaux, étudiante en psychologie.

Selon une étude réalisée par Gece en février dernier, plus de 52% des étudiants sondés déclarent que leur moral a drastiquement chuté. Ceux-ci comptent cependant sur les mois ensoleillés à venir pour reprendre un semblant de vie normale, avec les lieux culturels et de sorties à nouveau accessibles. L’occasion pour eux, comme pour tous, de profiter comme il se doit en faisant de nouvelles rencontres. De plus, les dernières nouvelles sont encourageantes. Selon les déclarations le 22 mai dernier de l’Institut Pasteur, la vaccination aurait un effet positif sur cet été. Si le rythme de la baisse du nombre de contaminés au coronavirus se maintient, les Français pourraient s’attendre à un été “tranquille”. De quoi garder espoir pour les mois à venir, et surtout pour l’année universitaire prochaine aux yeux des étudiants.

Consultez les autres articles sur les étudiants.

Par Maelle Faysse De Mulder.