Le Supercross français en péril

Populaire dans les années 90 à 2000, le supercross faiblit année après année. Manque de partenaires financiers et de médiatisation, la crise sanitaire est venue elle aussi toucher la discipline. Jean-Luc Fouchet, organisateur du championnat de France Sx Tour s’exprime à ce sujet

« Avant de parler du covid, c’est une réalité, mais le supercross c’était déjà un milieu fragile». 32 ans d’existence et le supercross souffre d’année en année. Jean-Luc Fouchet, organisateur du championnat de France Sx tour constate une dégradation générale de cette discipline, pourtant tant convoitée il y a vingt ans. « On tombe aussi dans une période où les organisateurs ne sont plus ceux d’il y a vingt ans, ils sont frileux », témoigne le président de JLFO. 


Très populaire et apprécié pendant des années, ce sport fait aujourd’hui polémique dans un monde où la place de l’environnement évolue. « On est malheureusement plus à la mode, on fait du bruit, on fait de la poussière, on n’est pas dans la bonne mouvance, on a tout faux », assure lui-même Jean-Luc Fouchet. 

La préoccupation écologique mène les partenaires, qui seraient prêts à aider, à ne plus le faire. L’image dégagée par la discipline n’est « pas extraordinaire ».
« Il ne faut pas avoir peur de le dire », poursuit avec désolation l’organisateur du championnat.
« On était déjà touché par rapport à ces faits-là mais avec le covid par par-dessus le supercross se meurt », confirme-t-il.

Un manque d’aide financière et de médiatisation

« Ce qui faisait son succès à l’époque, c’est que l’on en parlait ». A ses débuts et pendant une dizaine d’années, ce type de sport extrême était davantage médiatisé.
« Il a plus d’une vingtaine d’années, on avait entre six à huit chaînes maximum. Aujourd’hui on en a plus de deux cents et on n’arrive pas à sortir un produit », s’agace l’homme.
« Dans les années de Mickael Pichon, on arrivait à être sur Stade 2 presque tous les dimanche soir à 20 heures », fait savoir l’organisateur.

Aujourd’hui très peu voir aucune chaîne ne veut prendre un sport comme celui-ci. « Même si vous produisez les images, personne n’en veut. Ils vont prendre un événement comme le supercross de Paris, car c’est Paris ». Trop coûteux et plus assez populaire, le supercross s’effondre petit à petit. 
De plus, les aides ne sont plus les mêmes. « Par le passé on avait de gros partenaires, c’était un matelas financier sur lequel on pouvait se reposer ».
Les organisateurs savaient à l’avance, huit mois, un an avant que chaque épreuve soit réalisable.

Pendant ces « belles époques » d’importants partenaires extra-sportifs soutiennent le championnat. « Ces gros sponsors que l’on avait, c’était Chesterfield, Oxbow, Camel, Phillips ou encore Dunlop », raconte avec nostalgie J-L Fouchet.  « Aujourd’hui tout le monde mange dans la même gamelle. 
Par exemple, le sponsor Bihr, il nous aide nous, mais ils aident aussi plus de la moitié des pilotes du SX Tour. On a plus de partenaires extra-sportifs et c’est ce qui nous manque le plus ».

SX - Supercross - 1992 - Frédéric Vialle
Frédéric Vialle en direct au micro du TF1 au supercross du Parc des Princes, 1992. © Mireille Aliaga

« Le covid a fini de nous assommer »

La pente est difficile à remonter après une saison complète à blanc. L’an dernier huit épreuves étaient aux calendriers, mais ont finalement été annulées à cause de la crise sanitaire. L’équipe du SX Tour ainsi que les pilotes ont véritablement subi financièrement la situation.
Même si les investissements sont déjà fait, il y a toujours des loyers à payer. Notamment ceux des bâtiments pour stocker le matériel et l’essence des véhicules.
« On a entre 18 et 20 000 euros de frais tous les mois et cet argent il faut le trouver chaque mois et on ne le trouve pas », confie le gérant de l’organisation avant d’ajouter « le covid a fini de nous assommer ».  

Location des salles, électricité, montage et démontage des structures, gradin, ça coûte cher. C’est ce que confirme Jean-Luc Fouchet : « C’est un sport qui coûte extrêmement cher », explique Jean-Luc. « Notamment  l’hiver en Indoor où il a beaucoup plus d’investissement », détaille l’homme.. Le supercross de Genève et celui d’Amnéville, sont deux événements complètement différents. Genève étant le second supercross le plus grand d’Europe demande un financement plus important.

« A Genève il faut monter et démonter les tribunes donc cela à un coût beaucoup plus important », explique-t-il avant d’ajouter, « Amnéville c’est la plus petite salle et l’événement le moins coûteux, soit 180 000 euros, ce qui est raisonnable » assure l’organisateur. Mais pour faire la balance entre la colonne dépense et recette, les promoteurs doivent aussi vendre des billets. Car ce qui fait tenir encore ce sport aujourd’hui c’est le public. Néanmoins, cela risque d’être plus difficile pour les années à venir.

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Un championnat 2021 très limité

affiche officielle du Championnat de France 2021. ©Sx Tour

Jauge de public limité, primes des pilotes réduites, quatre courses au lieu de huit, le Sx Tour reprendra néanmoins en août prochain à Agen. Un soulagement pour les pilotes et les organisateurs laissés dans le flou, après, près de deux ans sans compétitions.

Après, près de deux ans sans épreuves de supercross, le championnat reprend le 21 août prochain à Agen dans le Lot-et-Garonne. Une nouvelle encourageante certes, mais un championnat qui sera très limité financièrement ainsi que pour le nombre de spectateurs. Une jauge limitée sera définie pour chacune des épreuves en fonction de la superficie du lieu.

Cette année c’est Jean-Luc Fouchet qui a  décidé de reprendre l’épreuve à Agen. « Je fais ça pour le championnat, car on doit sortir pour les pilotes au moins trois résultats cet été. Mais je le reprends avec une jauge de spectateurs à 2 500 », explique JLF. « Cela veut dire qu’il n’y aura pas de freestyle, pas de feu d’artifices, il y aura que du sportif.

Je ne sais même pas si je serai capable de mettre une douche pour les pilotes. On va être serré, serré, serré »

Jean-Luc Fouchet


Retrouvez les quatre lieux où se déroulera le Championnat de France Sx Tour 2021 : https://www.google.com/maps/d/edit?mid=1Ieg__a-Q-ka0qHvDK_9P6CJyaZaFmFWr&usp=sharing

L’organisateur reste néanmoins positif et confiant pour cette saison. Malgré les huit événements déprogrammés l’année dernière à cause du virus, seules quatre épreuves sont au calendrier cette saison. « Cette année, on a bon espoir, on a bon espoir. », répète Jean-Luc Fouchet. Un championnat que souhaite maintenir à tout prix les organisateurs :  « On va tout faire pour en tout cas. On va essayer de sortir un résultat à Agen, deux à Brienon. On fait déjà l’été et on verra pour le reste ».
Après Agen, les pilotes s’affrontent à Brienon, Paris et enfin Lyon.

Pour cette saison quelque peu particulière, les riders auront deux jours de compétitions par épreuve. A noter que cette année, le palais des sports de Lyon est réquisitionné comme centre de vaccination, l’épreuve se déplace à Eurexpo.

« Une nouvelle qui fait du bien pour nous les organisateurs comme pour les pilotes, qui sont tous dans une attente insoutenable depuis près de deux ans maintenant »

Jean-Luc fouchet

Adrien Escoffier : « C’est le vide depuis fin 2019, j’en ai marre d’attendre »

Restaurateurs, artistes ou encore sportifs, la crise du coronavirus a mis beaucoup de métiers en suspens depuis deux ans. Adrien Escoffier, pilote professionnel de motocross, n’a plus de travail et a aujourd’hui un avenir professionnel incertain. Une situation financièrement et mentalement difficile pour le jeune cross-man de 26 ans.

Connu des paddocks, Adrien Escoffier, pilote de motocross au sein du team Honda SR, est aujourd’hui sans activité professionnelle depuis plus d’un an et demi. Une situation critique pour le jeune aixois de 26 ans. Cela fait bientôt vingt mois, qu’il est sans revenu, car toutes ses compétitions sont annulées à cause de la crise sanitaire actuelle. Tout avait bien commencé, champion de France de supercross en 2018 et troisième en 2019, Adrien Escoffier fait partie d’une tranche de pilotes, qui vivent de ce sport et qui aujourd’hui sont laissés dans le flou. 


« C’est le vide depuis fin 2019, j’en ai marre d’attendre », confie le cross-man. « Je ne sais pas si le mot est assez fort, mais je suis dégoutté », poursuit perdu, Escoffier.
Dans l’attente et sans savoir où il va, Adrien Escoffier continue néanmoins de s’entraîner dans l’espoir que les prochaines compétitions en dates soient maintenues. 
«Je m’entraîne, mais mentalement ce n’est pas la même que d’habitude, je vais rouler s’en avoir d’objectifs précis, c’est bidon comme vie, comme situation et surtout comme état d’esprit».  Après une année à blanc pour le poulain du team SR et si la situation n’évolue pas, il ne restera pas à attendre et sera obligé de revoir ses plans professionnels.



Une minute d’entraînement avec Adrien Escoffier au motocross de Sommière. © Marie Lozzi

 « j’attends, en espérant voir le bout du tunnel »

Toujours en attente de réponses concrètes, d’un certain feu vert. « Aujourd’hui j’ai le cul entre deux chaises, car je ne sais pas si les compétitions vont reprendre et être maintenue donc je ne peux pas faire un réel changement de direction », explique-t-il. « Je ne peux pas m’engager avec un employeur ou dans quelque chose de sérieux», poursuit Adrien Escoffier.  Actuellement, entre deux interrogations : celle de mettre son métier de sportif de côté et celle de rester dans l’incertitude et l’attente et effectuer des petits jobs à droite à gauche en espérant que les prochaines échéances soient maintenues. 

« J’attends, en espérant voir le bout du tunnel  », voilà ce que répète sans cesse le sportif abattu. Mais en vue de la complexité de la situation sanitaire et l’organisation des compétitions, la saison du pilote semble encore incertaine. Cette année seulement quatre courses sont affichées au calendrier sportif. Et si celles de cet été sont annulées  il n’y en aura probablement pas cet hiver non plus, car ce seront des épreuves indoor. « Je reste quand même positif pour cette saison et si cela ne le fait pas j’irai travailler », songe-t-il très sérieusement. Une envisageable reconversion qui reste néanmoins compliquée pour un homme de 26 ans qui n’a jamais jamais connu le monde du travail.

« Aujourd’hui j’ai le cul entre deux chaises, car je ne sais pas si les compétitions vont reprendre et être maintenue donc je ne peux pas faire un réel changement de direction »

Adrien Escoffier

Zéro course, zéro rentrée d’argent

« J’ai mis ma vie de côté pour faire de la moto ». Aidait et poussait par son père financièrement depuis l’âge de ses neuf ans,  Adrien Escoffier a également connu une passé de pilote professionnel chez Kawasaki usine, avec un salaire fixe.Aujourd’hui c’est financièrement plus dur, car «  je suis peut-être pilote professionnel, mais je suis payé à la prime, donc s’il y a  zéro course, il y a zéro rentrée d’argent », explique le pilote Honda. Étant auto-entrepreneur, le jeune homme de 26 ans n’a pas le droit au chômage. « Heureusement que j’ai un peu d’argent de côté, je pioche dedans, mais ça part plus vite que ce que ça rentre», poursuit Adrien avec un  rire légèrement crispé.


C’est dans cette tranche d’âge, 25 et 30 ans, que ces sportifs sont au plus haut de leur carrière et là où ils gagnent le plus d’argent. Mais la crise en a décidé autrement pour le futur du pilote.  « Je comptais partir de chez mon père, car jusqu’à présent, et on le sait une carrière sportive c’est court, donc le but était de mettre de l’argent de côté », révèle t-il avec déception. « Ça repousse tout objectif, tes projets et tes ambitions. A la limite lorsqu’on le sent arriver tu prévois, mais quand du jour au lendemain ça s’arrête, c’est compliqué. Je ne sais pas trop quoi faire », conclut Adrien Escoffier.